Ce blog est une histoire, mon histoire. Il est aussi ma manière d'apprivoiser ce qui m'arrive actuellement.

Si vous arrivez en cours de route, je vous conseille de commencer par le tout début, comme dans toute histoire...
Personnellement, je n'en connais pas encore la fin!

Si vous êtes déjà venu, vous pouvez faire votre choix dans "Le récit pas à pas".

dimanche 7 décembre 2014

Lâcher-prise

Mi-septembre... Me voilà déjà face à la troisième chimio.

Je ne dois pas oublier pourquoi je la fais : c'est pour réduire la taille de l'épée de Damoclès au dessus de ma tête !

Malgré tout, celle-ci, je « l'attendais » avec crainte... D'abord, il y a les enfants. J'ai réussi à les caser. Je ne veux pas qu'ils me voient dans cet état second de « rouleau compresseur ».

Ensuite, arrivés à la clinique, nous (Albert et moi) apprenons que mon oncologue est elle même malade. En remplacement, j'ai droit à une visite éclair chez un de ses collègues... Mais ce n'est pas pareil. Il n'y a pas cet état de confiance...

Je me retrouve dans une chambre, sur un lit, cette fois. J'ai demandé un lit : j'ai besoin de pouvoir me reposer si j'en ai besoin! Albert et moi écoutons des chansons de Brassens sur le GSM. Je ne me sens pas bien. Ce goût dans la bouche... Et puis les pochettes sont branchées. Je n'arrive plus à les regarder. Elles me dégoûtent. Comme la soupe, le thé et les sandwichs mous servis à midi. J'essaie de les manger mais c'est sans appétit aucun.

Cette fois, je n'ai pas la force de marcher jusqu'à la voiture. Albert doit ralentir le pas très fort. Il me porte presque. Il me voit :blanche comme une morte. Je fais allusion au fait que je vois au travers de mes doigts. J'attends Albert à l'entrée de la clinique. Je ne vois pas les gens passer. Parfois si. Mais je dois faire un effort surhumain. Alors je me laisse aller dans l'état second dans lequel je suis.

Nous rentrons rapidement. Je vais me coucher. Je suis mal. Très. Toute la nuit hachée, je me sens mal, d'ailleurs.



Dans un moment de lucidité consciente (ou de conscience lucide) je me fais la réflexion qu'un rouleau compresseur ne peut pas diminuer la taille d'une épée. Toute Damoclès qu'elle soit. J'en touche un mot à Albert... qui me parle alors du « Marteau Pilon », une énorme machine destinée aux forgerons, qui peut travailler sur des petites pièces aussi.

Le lendemain, les enfants reviennent après l'école. Je suis zombie. Mais je suis contente de les retrouver. Je mords dans un morceau de chocolat... et je suis prise d'une nausée extraordinaire, qui ne me quitte plus pendant plusieurs heures, plusieurs jours. Dommage. Je vais devoir faire abstinence de chocolat...

La semaine se passe nauséeuse, fatiguée... Je ne supporte plus qu'on fasse allusion à une « chimio ». Ni à quelque chose qui s'en rapproche : l'épée de Damoclès, le marteau pilon, la soupe, le thé,... tout ça me file la nausée directement.

Après une discussion avec un ami, je me rends compte que je dois « lâcher ». J'ai du mal. Je m'accroche à mes convictions, je me froisse au moindre propos qui ne va pas dans mon sens. Mais j'ai un livre qui m'aide dans ces moments là. Un livre précieux, offert par Mère-Grand : « Mettre en pratique le pouvoir du moment présent ».

« Lâcher prise, c'est accepter intérieurement ce qui est sans réserve. Ce dont il est question ici, c'est de votre vie – en cet instant – et non des circonstances ou de ce que j'appelle vos conditions de vie. 
[…] 
Votre première chance, c'est de lâcher prise chaque instant devant la réalité du présent. Sachant que ce qui est ne peut être défait – puisque cela est déjà -, vous dites oui à ce qui est ou vous acceptez ce qui n'est pas.Ensuite, vous faites ce que vous avez à faire, selon les exigences de la situation. Si vous vous maintenez dans cet état d'acceptation, vous ne créez plus de négativité, de souffrance ou de tourment. Par conséquent, vous vivez dans un état de non-résistance, de grâce et de légèreté, libre de tout lutte intérieure. 
[…] 
La seconde chance à votre portée pour lâcher prise, c'est d'accepter ce qui est en vous à défaut d'accepter ce qui est extérieur à vous. S'il vous est impossible d'admettre les circonstances extérieures, alors acceptez la situation intérieure.Autrement dit, vous ne devez pas résister à la souffrance. Donnez-lui la permission d'être là. Lâchez prise face au chagrin, au désespoir, à la peur, à la solitude ou à toute autre forme adoptée par la souffrance. Soyez-en le témoin sans l'étiqueter mentalement. Accueillez-la.Par la suite, observez la façon dont le miracle du lâcher-prise transforme la souffrance profonde en paix profonde. Cette situation est votre crucifixion. Laissez-la devenir votre résurrection et votre ascension. 
[…] 
Quand il n'y a toujours pas moyen de s'en sortir, il y a toujours moyen de passer à travers. Alors, ne vous détournez pas de la souffrance. Faites-lui face et sentez-la pleinement. Je dis bien la sentir, non pas d'y réfléchir ! Exprimez-la si nécessaire, mais ne rédigez pas mentalement de scénario à son sujet. Accordez toute votre attention à l'émotion et non pas à la personne, à l'événement ou à la situation qui semble l'avoir déclenchée.Ne laissez pas le mental utiliser la souffrance pour en confectionner une identité de victime. Vous prendre en pitié et raconter votre histoire aux autres vous maintiendra dans la souffrance. Puisqu'il est impossible de se dissocier de l'émotion, la seule possibilité qui reste pour changer les choses, c'est de passer à travers la souffrance. Autrement, rien ne bougera.Alors, accordez toute votre attention à ce que vous sentez et retenez-vous de l'étiqueter mentalement. Soyez très vigilant quand vous plongez dans l'émotion.Tout d'abord, vous aurez peut-être l'impression d'être dans un lieu sombre et terrifiant. Et quand un besoin pressant se fera sentir de lui tourner le dos, restez là à l'observer sans passer à l'action. Continuez à maintenir votre attention sur la souffrance, à sentir le chagrin, la peur, la terreur, la solitude ou toute autre chose. Restez alerte et présent. Présent avec tout votre être, avec chacune des cellules de votre corps. En faisant cela, vous laissez entre un peu de lumière dans toute cette obscurité. Vous y amenez la flamme de votre conscience. » 
Mettre en pratique le pouvoir du moment présent – Eckhart Tolle, p136-139


Le livre a raison. Quand j'arrive à passer "à travers" mes nausées, ma fatigue, ma lourdeur, mon écrasement, ma "mollatitude", je me sens bien. Je me sens sereine. Je dois "juste" rester vigilante. 
Et ce n'est pas facile. 

2 commentaires:

  1. Très beau récit, j'ai vécu exactement la même chose en 2004, depuis j'ai fait 2 récidives avec d'autres protocoles , 2 chutes de cheveux , et jeudi je reprends une troisième fois une chimio, avec les même effets secondaires alors le lâcher-prise ...... il faut vraiment le pratiquer !! Courage pour la suite.

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  2. Redite : que d'espérance dans ce texte ! Merci....

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